C’était le 29 juillet !
- Johhnie Paulgrut venait de battre le record du monde du 100 mètres mais devait encore passer le contrôle anti-dopage.
- Le nouveau déodorant pour chien venait d’être lancé avec succès sur le marché de la plus grande île de la planète.
- Deux entreprises industrielles étaient en train de faire faillite et leurs directeurs jouaient au golf ensemble.
- Madame Vondobl avait un problème avec son chat qui avait la colique. Elle était si seule, comment faire ?
- …
En ce jour bien ordinaire, des milliers d’anecdotes émaillaient le monde de leurs détails, parfois intéressants, parfois vraiment ennuyeux, parfois carrément stupides ou honteux.
- Dans cet autre endroit, des hommes et des femmes mouraient de faim tandis que leurs dirigeants étaient réunis à manger des petits fours et à discuter de leur prochaine livraison d’armes.
- Ici c’était des naissances, là des morts, ici la joie et là la détresse.
- Dans un laboratoire, des savants pensaient avoir découvert une incroyable source d’énergie. Mais en fait ils l’avaient découverte…
- …
En fin de compte tous ces éléments étaient secondaires, à l’échelle de l’univers ! Un seul point était important concrètement sur cette planète en ce 29 juillet !
C’était simplement la fin d’un monde !
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Il est étonnant comme la simple forme extérieure d’un objet peut influer sur l’acte d’achat d’un consommateur. De nos jours le design est omniprésent et prend en compte de nombreux paramètres tels la praticité, la beauté, l’utilité, le look et bien d’autres. Tous ces éléments forment un tout plus ou moins cohérent qui conditionne le succès du produit.
Ces éléments prennent en compte l’être humain pour lequel le produit a été conçu, s’adaptent à des stéréotypes et visent des objectifs faisant bien souvent appel à la force de l’inconscient collectif.
De nombreux produits aux solutions technologiques éprouvées et à l’aspect pratique supérieur à bien d’autres n’ont pas survécu à leur lancement simplement parce que le design était un caractère important dans la décision d’achat et que celui-ci était raté ou qu’il avait brisé trop de stéréotypes d’un seul coup. Le design est le reflet de son époque et de sa durée de vie planifiée. Relativement neutre et passe partout pour traverser les époques, beaucoup plus typé pour faire face à des phénomènes de mode, celui-ci est en fin de compte le parfait baromètre de la société dans lequel il évolue.
Dès lors que penser d’un objet créant instinctivement et instantanément un fort sentiment de révulsion et de rejet ?
Que penser d’un objet dont la vision même choque ?
Un objet dont toute harmonie est absente ?
Un objet que l’esprit refuse même admettre avoir vu ?
Très simple, il s’agit soit d’un design mal adapté…
Soit d’un produit destiné à des consommateurs/utilisateurs fondamentalement différents !
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Sur l’écran, Mardl’a assistait à la vie de tous les jours d’une époque révolue.
Les citées étaient riantes et animées, et même s’il lui semblait que certaines parties du monde qui lui étaient montrées étaient pauvres, ceci n’égalait de loin pas la misère qu’elle connaissait sur “sa planète”. Après un moment de silence, un commentateur se mit à parler et à expliquer les images. Bien malgré elle, Mardl’a était fascinée par cet univers qu’elle ne connaissait pas.
— C’est ici que tout c’est arrêté et que tout à recommencé. La cité des sciences, l’endroit le plus avancé de la planète. L’endroit affranchi de tout gouvernement, l’endroit de la liberté intellectuelle. Le lieu où tous les savants du monde se retrouvaient pour développer les programmes les plus fous. Marier des techniques et des champs d’applications différents en était la spécialité ! C’est d’ici que toutes les inventions destinées au monde partaient. C’était le 29 juillet, une belle journée comme les autres et que rien ne destinait à entrer dans la liste rouge de l’histoire !
Sur l’écran un jeune homme, l’œil vif et la démarche rapide, se dirigeait vers un bâtiment que Mardl’a reconnut avec stupéfaction comme étant celui dans lequel elle était entrée. Le jeune homme paraissait excité et une telle énergie semblait presque surnaturelle à Mardl’a qui avait l’habitude de voir des gens passablement amorphes.
A peine entré, le jeune homme entraîna son assistante dans son sillage et une fois franchi le périmètre sécurisé du labo lui demanda :
— Alors Maddie, prête à tenter l’expérience de notre nouvelle source d’énergie ?
— Oh oui Ronald, je suis vraiment excitée, si nos calculs sont exacts, nous n’aurons plus besoin de pétrole ni d’électricité, les rayons Peuta pourront tout remplacer avantageusement à court terme.
— Le problème est que la réalisation des capteurs et émetteurs demande une formidable quantité d’énergie. Toute la puissance de la centrale nucléaire de la ville a été mobilisée pour réaliser la fusion des composantes nécessaires, c’est surprenant de penser que nous devons investir tant d’énergie pour en disposer ensuite à profusion éternellement.
Avec surprise Mardl’a sembla reconnaître le laboratoire dans lequel elle avait été accueillie. Son hôte le lui confirma d’un mot tout en lui demandant d’être attentive sur la suite des événements auxquels elle assistait sur l’écran.
La jeune femme et le jeune homme mirent leurs lunettes de protection et entrèrent dans une petite salle au centre de laquelle se trouvait une sorte d’assemblage composite bardé d’antennes et de voyants lumineux.
S’approchant lentement, la caméra passa au-delà de cette construction hétéroclite et découvrit un deuxième assemblage que la jeune fille reconnut comme étant similaire à la source d’énergie qui alimentait son village. De celui-ci sortait un petit fil qui reliait une dizaine de projecteurs très puissants pour le moment éteints.
Après un dernier contrôle, les deux savants se regardèrent et sans dire un mot réalisèrent les dernières connections. Puis Ronald enclencha la machine !
Rien ne sembla se passer, puis simultanément plusieurs événement se produisirent:
– Les spots s’allumèrent
– L’éclairage du bâtiment vacilla et s’éteignit
– L’éclairage de secours se mit en fonction.
Le commentateur repris le cours de ses explications tandis que sur l’écran les images montraient que toute l’agglomération semblait paralysée.
— L’expérience de Maddie et Ronald avait réussi au-delà de toutes attentes, la source d’énergie était fonctionnelle et inépuisable. Malheureusement la connexion sur les ondes Peuta avait déclenché un processus planétaire irréversible, la planète en répondant à la sollicitation Peuta avait instantanément changé l’équilibre électrique de tous ses atomes et il n’était plus possible de créer de l’électricité. Toute vie sur la planète allait donc rapidement devoir adopter les ondes Peuta en remplacement de l’électricité.
Les éléments de secours basés sur les piles sèches allaient continuer à fonctionner mais pour un temps limité puisqu’il était impossible de les recharger.
La lumière se ralluma dans la salle et l’homme lui dit:
— Ce que personne n’avait prévu était arrivé ! La nouvelle source d’énergie était bien là, inépuisable, gratuite, non polluante et non dangereuse. Toutefois le problème était que pour la capter en suffisance pour alimenter le monde, il fallait un capteur Peuta et que pour réaliser celui-ci, une phénoménale énergie était nécessaire. Une énergie dépassant de loin la puissance du seul capteur Peuta en activité! La civilisation telle que connue était condamnée à évoluer vers une autre civilisation moins dépendante de l’énergie. L’anarchie s’installa dans le monde qui peu à peu se transforma. Des épidémies surgirent, des guerres pour une parcelle d’énergie. Seule la cité parvint à survivre, un gouvernement de savants prit le pouvoir et édicta les règles qui nous gouvernent encore aujourd’hui, pas de recherche et pas de nouvelles sciences ! Voyez-vous ma chère, c’est pour cette raison que les prêtres-savants sont contre le progrès, ils ont été conditionnés à y voir le danger !
— Mais ce générateur existe toujours ! Sinon comment aurions-nous de l’énergie ?
— Oui, il a été déplacé dans le palais du gouvernement et c’est lui qui alimente en énergie toute la planète. Il n’y a pas d’autre source. Mon aïeul a fait une erreur, mais comment lui en vouloir ? Qui aurait pu deviner que les ondes Peuta allaient annihiler l’électricité ?
Le savant semblait très satisfait de la vivacité d’esprit de la jeune femme. Il reprit ensuite la parole pour lui raconter une histoire complètement folle…
— Je suis le descendant direct de Ronald, oui tu l’as deviné. Malheureusement pour lui, la découverte des rayons Peuta a été trop soudaine et ses conséquences trop dramatiques pour lui laisser l’occasion de réparer sa faute. J’ai étudié les propriétés de cette découverte toute ma vie et suis convaincu que la solution existe, travaillant dans l’ombre du pouvoir j’ai pu amasser des preuves de la réelle possibilité de contourner les inconvénients. Malheureusement je ne suis pas assez indépendant pour pouvoir aller plus en avant dans mes recherches. Le conditionnement que j’ai subi, même si j’ai pu en détourner une grande partie, m’interdit de réfléchir et de travailler sur certains concepts.
— Et en quoi sommes nous concernés par vos problèmes ?
La jeune femme était bien décidée à ne pas s’en laisser compter. Elle était sur le point de se lever lorsque l’homme lui dit:
— Tu es la mère du sauveur !
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